
La théorie de l’enracinement est le processus par lequel un manager tente de se rendre irremplaçable, ou incontournable, pour bloquer certaines évolutions et/ou empêcher son remplacement.
Le stratagème le plus fréquemment employé consiste à rendre leur remplacement coûteux.
La théorie de l’enracinement peut être préjudiciable à l’entreprise si les intérêts des dirigeants et des actionnaires ne sont pas convergents.
Théorie de l’enracinement et absence de contrôle
La théorie de l'enracinement suppose que les acteurs développent des stratégies destinées à conserver leur statut dans l'organisation et à évincer d'éventuels concurrents.
Selon cette théorie, l’objectif est de rendre un remplacement si coûteux pour une entreprise que celle-ci finisse par y renoncer. En retour, cette situation permet aux dirigeants d’accroître leurs pouvoirs et leurs espaces discrétionnaires.
La théorie de l’enracinement ne concerne pas uniquement le top management d’une entreprise. Par extension, elle concerne tous ses acteurs dès lors qu’ils peuvent utiliser leurs ressources pour s'enraciner, augmenter leur pouvoir et continuer à jouir des avantages dont ils profitent.
A contrario, la théorie de l'enracinement démontre que les mécanismes de contrôle et d'incitation destinés à augmenter les performances des dirigeants ne sont pas toujours assez efficients pour les contraindre à gérer une société en conformité avec les intérêts des actionnaires.
Bon à savoir : l’économiste Josph Eugène, Stiglitz, prix Nobel d’économie en 2001, a notamment démontré comment l'asymétrie d'information avec des concurrents peut être utilisée pour les dissuader de postuler à la direction d’une entreprise. À cet égard, selon Stiglitz, la politique d'investissement constitue notamment un outil d'enracinement majeur pour les dirigeants.
Stratégies et théorie de l’enracinement
La volonté d’enracinement vise à émanciper autant que faire se peut le dirigeant du contrôle des actionnaires, afin de conserver sa position, d'accroître sa liberté d'action et, si possible, de maximiser ses rentes.
Plusieurs stratégies d’enracinement sont possibles. Parmi les principales, on recense :
- la stratégie idiosyncrasique : elle consiste à persuader les actionnaires que le remplacement du dirigeant aura pour effet de les appauvrir. Devant cette perte de valeur potentielle, ils renoncent à le déposer ;
- la stratégie de désinformation : les dirigeants investissent dans des projets dont ils sont seuls à maîtriser les tenants et les aboutissants. Cette asymétrie d’information dissuade d’éventuels concurrents de les menacer, car ils ne maîtrisent pas la règle du jeu ;
- la stratégie relationnelle : cette technique consiste à créer un réseau relationnel avec ses collaborateurs en les choyant afin que ceux-ci aient intérêt à ce que l’équipe dirigeante reste en place. Ce tissage relationnel peut aussi jouer avec les administrateurs, les actionnaires, etc.
Théorie de l’enracinement et asymétrie de l'information
La théorie de l'enracinement démontre que l’information est une ressource essentielle des organisations et que sa détention est une source de pouvoir considérable.
Plus l’asymétrie informationnelle avec les partenaires et les agents (actionnaires, etc.) chargés de contrôler les dirigeants s’accroît et plus ceux-ci peuvent s'enraciner. Ce risque s'accroît si les contrôleurs sont incompétents ou trop proches de la sphère du pouvoir pour la remettre en cause (si nécessaire).
Bon à savoir : afin de remédier à cette divergence d'intérêts, plusieurs mécanismes de contrôle internes et externes peuvent être mis en place au sein des organisations. Ils consistent à analyser les stratégies adoptées par les dirigeants et à s’assurer qu’elles sont convergentes avec les intérêts des actionnaires.